Un fait assez triste a assombri l’atmosphère du CHR de Katiola le 30 novembre 2022 dernier, laissant tout le personnel encore sous le choc. En effet, Sanogo Boudougou, institutrice de son état, enceinte et presque à terme, est morte suite à l’accouchement de son bébé, dans la nuit du mardi au mercredi 30 novembre 2022, à 4 heures 16 minutes. Dès lors, une rumeur accusant les sages-femmes d’être à la base de sa mort a fait le tour de la ville comme une traînée de poussière. Des professeurs font le récit de l’événement à leurs élèves comme s’ils y étaient. Au marché comme dans les rues, elles sont victimes d’injures, d’outrages et d’accusations verbales, surtout de la part des institutrices, collègues de la défunte.
Le dimanche 26 novembre 2022, ayant constaté que le bébé ne bougeait plus dans son ventre, Sanogo Boudougou décide de faire une échographie pour être rassurée. Elle en fait deux, une dans une clinique et l’autre au CHR de Katiola. Toutes les deux ont attesté que le bébé ne vivait plus. Son médecin traitant, Docteur Bagaté, celui là même qui l’a suivi pour la conception de la grossesse, puisqu’elle avait des difficultés pour concevoir, l’a suivi lors de l’évacuation du fœtus par voie basse.
Selon lui, tout s’est très bien passé. Le liquide amniotique n’était pas infecté, aucun signal ne présageait la mort de la patiente, aucun saignement. Elle a accouché sans aucune difficulté aux environs de 22 heures et placée en salle d’observation. Elle a échangé avec son mari, son neveu et plusieurs sages-femmes avec qui elle entretient de très bonnes rélations. La major principale en chirurgie qui a suivi tout le processus de son accouchement est restée avec elle en salle d’observation, avec la responsable de salle, toutes deux des sages-femmes. Il faut signaler que la patiente et la major en chirurgie sont des amies, tout comme leurs époux. Tout semblait donc bien se passer
Cependant, aux environs de 23 heures, la patiente avait commencé à saigner. La major fait appel à Docteur Bagaté qui abandonne un patient sur le lit d’opération pour courir à son cheveux. Il fait tout pour trouver du sang, à leur propre frais, pour lui administrer, ainsi que d’autres soins. Tout rentre dans l’ordre, et le docteur retourne en salle d’opération. Après s’être reposée un peu, elle se met à faire des prières islamiques pour glorifier Dieu.
« Vers minuit, elle a commencé à prier, disant merci à Dieu pour tout. En ce moment, j’ai commencé à avoir peur. Je l’ai appelé pour lui demander pourquoi elle faisait de telles prières, elle ne disait rien. Je m’assois près d’elle et la prend dans mes bras. Elle rend l’âme dans mes bras 16 minutes après », relate Madame Diomandé, sage-femme, major en chirurgie, les larmes aux yeux et la voix toute nouée. Une blessure qui aura du mal à guérir face aux lynchages subis par elle et ses collègues. « Nous avons aussi des droits et nous sommes par dessus tout des humains et non Dieu, il a sa volonté à lui », a-t-elle dit pour finir
La major et la responsable de salle ont demandé à être affectées, suite à cette affaire. Chose que l’administration a du mal à accepter, vu le nombre insuffisant de personnel de santé de qualité. Docteur Touré, adjoint au directeur du CHR, a indiqué que c’est le Docteur Bagaté qui s’est battu pour que Sanogo Boudougou puisse tomber enceinte. « Il est incongru de fournir tant d’effort pour permettre à une patiente de concevoir et ensuite lui ôter la vie, alors que c’est une victoire pour lui, en tant que médecin! » a-t-il déclaré. Il a confié que les deux agents qui ont demandé à être mutés sont de très bons agents et que leur départ sera un gros manque pour l’hôpital. » Ce décès nous montre qu’en tant que homme, nous avons des limites. Sinon Sanogo était spécial dans cet hôpital », a conclu le directeur adjoint du CHR.
Le Président de la Commission des Droits de l’Homme de la région du Hambol qui a diligenté un monitoring sur la question, compte prendre des dispositions avec le corps préfectoral pour une rencontre entre les enseignants et les sages-femmes en vue d’une cohésion au sein des deux corporations.
Le Président du mouvement des Ivoiriens pour les Droits de l’Homme (MIDH), après avoir déploré ce malheureux incident, a fait savoir aux responsables de l’établissement que si la rumeur a circulé sans aucune preuve, et que des personnes ont réagit ainsi, c’est certainement parceque plusieurs griefs sont formulées contre les agents de santé.
A cet effet, Monsieur Bio, le nouveau directeur du CHR a invité les structures de défense des droits de l’homme à lui faire remonter les critiques et mécontentements des populations contre les agents, afin qu’ensemble ils puissent corriger les imperfections, car dans tout œuvre humaines il peut y avoir des brebis galeuses, mais pas cette fois. Il a invité les populations à faire preuve d’indigence.
Fatime Souamée, Correspondante régionale