La perspective de la prochaine élection présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire donne à voir un schéma tout à fait singulier. Puisqu’on est face à une crise pré-électorale à trois têtes. Qu’on en juge.
A quelques mois de la présidentielle 2025, la scène politique connaît des mutations qui sont en train de redessiner les contours des forces en présence. Ainsi, l’alliance projetée entre le PDCI-RDA et le PPA-CI semble avoir pris du plomb dans l’aile après la disparition du président Henri Konan Bédié. On est désormais face à deux entités qui sont certes du même bord mais qui n’ont plus beaucoup d’atomes crochus. Et chaque jour qui passe les éloigne davantage l’un de l’autre. Du coup, au sein de l’opposition, l’on a au moins deux oppositions constituées, d’un côté, par le PDCI-RDA, pris les pieds dans les difficultés auxquelles est confronté son président Tidjane Thiam et, de l’autre, le PPA-CI avec tous les partis qui gravitent autour de cette formation.

Face à ces deux blocs, on a le RHDP campé sur ses certitudes avec l’avantage d’être uni et plutôt déterminé à conserver son pouvoir. On a donc, in fine, trois protagonistes au cœur de ce qui peut être appréhendé comme une crise pré-électorale en téléchargement qui occupe déjà les esprits échaudés par la grande déchirure consécutive au contentieux électoral de 2011. Il est des traumatismes dont on guérit difficilement. Les Ivoiriens pourront-ils définitivement se remettre de ce conflit fratricide qui a fait plus de 3000 morts et impacté durement et durablement la cohésion sociale ? La question reste posée. En attendant, on peut regretter que le PDCI-RDA et son président aient été suffisamment légers pour créer une situation dont ils n’ont pas le courage d’assumer la responsabilité, préférant se défausser sur le régime qu’ils accusent de vouloir disqualifier politiquement l’ancien patron de Crédit suisse.
Parce qu’à la vérité, ce qui est arrivé à Tidjane Thiam, radié de la liste électorale aurait pu être évité si ce dernier s’était vraiment préparé à postuler à la magistrature suprême en 2025. Aussi, se serait-il depuis longtemps défait de la nationalité française avant de prendre la tête du vieux parti. Mais, faute d’avoir manqué d’anticipation, il se trouve empêtré dans un imbroglio judiciaire qui lui a déjà coûté sa présence sur la liste électorale. Et pourrait, peut-être, le pire n’étant toutefois jamais sûr, conduire à la suspension de son mandat à la présidence du PDCI avec toutes les conséquences qui en découlent.

Il reste néanmoins avéré qu’il reste Ivoirien. Sa nationalité n’ayant jamais été remise en cause. Sauf qu’il a adopté un ton et une posture qui pourraient le présenter comme le candidat de l’étranger. Une occurrence qui n’est pas faite pour le rapprocher du PPA-CI et du FPI qui se revendiquent plutôt souverainistes. Ce sont autant de paramètres qui élargissent davantage le fossé entre la doyenne des formations politiques et les autres au sein de l’opposition qui semble avoir perdu son unité.
On l’a vu récemment, lorsque le PPA-CI de Laurent Gbagbo et GPS de Guillaume Soro se sont désolidarisés du PDCI-RDA à Paris où s’est tenue une manifestation de protestation en soutien au successeur de feu Aimé Henri Konan Bédié après que la juge Aminata Touré a ordonné, le 22 avril, sa radiation de la liste électorale.

Pendant ce temps, le RHDP affiche sa sérénité. Mais pas tant que ça. Puisque son candidat putatif, le président Alassane Ouattara, ne s’est toujours pas officiellement prononcé. Que cache ce mutisme ? Nul ne le sait.
Cependant, on peut le dire, il n’y a pas le feu dans la Maison RHDP où toutes les troupes sont mobilisées pour octobre prochain. Il est donc clair que l’opposition est mal barrée face au régime en place. D’autant que la stratégie du Tout Sauf Ouattara qui se profile en filigrane derrière le refus de la candidature du président de la coalition présidentielle a peu de chances de prospérer. C’est ça qui est la vérité, aurait soutenu l’Ivoirien moyen.
Franck ETTIEN