Avant son retour, Charles Blé Goudé a accordé une interview à la chaine de télévision ivoirienne, NCI. Qui a annoncé la diffusion intégrale pour ce mardi soir. Mais, une bribe de cet entretien est déjà disponible. Dans laquelle l’ancien ministre de la rue de Laurent Gbagbo dit : « Laurent Gbagbo est le frère d’Alassane Ouattara. Alors que je suis le fils de Laurent Gbagbo. Donc Alassane Ouattara est mon oncle ». Une telle affirmation caricaturale à première vue est plus profonde de sens qu’elle n’en donne l’air.
En effet, acquitté définitivement le 31 mars 2021 de crimes contre l’humanité dont il était poursuivi devant la CPI (Cour pénale internationale), Charles Blé Goudé a dû attendre le 30 mai 2022 pour obtenir son passeport ivoirien qui lui donne le droit d’entrer en Côte d’Ivoire. Soit plus d’un an d’attente. Pourtant, son codétenu, Laurent Gbagbo, accusé pour les mêmes crimes est relaxé le même jour, est depuis sur les bords de la lagune Ebrié. Il a même fondé un nouveau parti, le PPACI. Abandonnant le Fpi, son parti originel aux mains de Pascal Affi N’guessan.
Cette longue attente de Charles Blé Goudé pour n’avoir que son passeport lui aura forcément enseigné beaucoup de choses. Un, que son destin n’était pas forcément lié à celui de son mentor Laurent Gbagbo. Deux, qu’il faut faire de la real politique. Sinon, Laurent Gbagbo ne serait pas rentré au bercail sans lui. Et ça n’aurait pas été le premier combat du genre que celui-ci aurait mené de la sorte. Car, Laurent Gbagbo, on se rappelle avait refusé d’aller aux élections présidentielles de 1995 parce qu’Alassane Ouattara, le chef du Rdr d’alors en était écarté pour cause d’ivoirité.
D’où que Charles Blé Goudé juge-t-il bon de s’adresser à ceux qui voudraient lui donner mauvaise conscience en le traitant de traître. D’abord pour avoir posé, après l’obtention de son passeport, devant la photo officielle du président de la République, Alassane Ouattara au sein de l’ambassade de la Côte d’Ivoire aux Pays-Bas. Ensuite, pour son orientation et ses choix politiques, lorsqu’il sera de retour au pays. Lesquels choix, ça ne devrait pas étonner, pourraient être aux antipodes de ce que les GOR (Gbagbo ou rien) espèrent.
L’ancien leader de la Fesci avait déjà prévenu : « quand la maman parle à son fils, l’orphelin tend l’oreille ». Une façon pour lui de faire savoir qu’il a pris de la bonne graine de tout ce qui s’est déjà passé en Côte d’Ivoire depuis la grave crise qui a secoué le pays entre 2010 et 2011, et qui a fait officiellement plus de 3000 morts. Puisque cette crise n’a pas seulement divisé qu’un pays. Elle a divisé le Fpi qui était au pouvoir et tous ceux qui étaient ses sympathisants ou proches. De sorte qu’il suffise pour l’un d’entre eux d’oser discuter avec le pouvoir d’Alassane Ouattara qu’il est tout de suite taxé de traitre. Mamadou Koulibaly puis Pascal Affi N’guessan en ont fait les frais. Ainsi que plusieurs autres. Quand ces derniers ont voulu « tourner » la page Gbagbo.
Charles Blé Goudé sait que, s’il ne fait pas le choix de Laurent Gbagbo, il sera mangé à la même sauce. C’est pourquoi, il prévient et justifie dès maintenant, avant son retour, sa future position politique. Surtout qu’il est chef d’un parti politique, le Cojep qui voudra compter dès les élections municipales et régionales qui s’annoncent pour 2023.
Franck ETTIEN