La Côte d’Ivoire est empêtrée depuis quelques temps dans cette histoire de trafic de drogue, avec récemment la saisie d’une importante quantité de cocaïne à Abidjan et San pedro. Depuis lors tous les regards sont tournés vers le pays du cacao, en vue de voir les tenants et les aboutissants de cette affaire.
L’évasion du dealer Franco-sénégalais de trafic international de drogue TAMBEDOU Mohamed détenu depuis 2019 à la maison d’Arrêt et Correction d’Abidjan (MACA) relance la problématique du trafic de drogue et ses aléas dans notre pays. Il faut noter que depuis le 2 juin 2022, plusieurs personnes ont été inculpées et écrouées à la MACA pour délit de trafic international de cocaïne relatif à une enquête sur la saisie de plus de deux tonnes de cocaïne à Abidjan et San-Pedro en fin Avril 2022.
La lutte contre les drogues constitue une priorité de l’action publique, afin de protéger nos concitoyens, en particulier les plus jeunes. Problématique sociétale complexe, elle concerne directement la sécurité des citoyens et constitue un sujet du débat public. Elle engage de nombreux secteurs d’activité dans des champs d’action divers et dont les objectifs nécessitent d’être mis en cohérence. La responsabilité de cette lutte engage inéluctablement les pouvoirs publics.
Notre pays se trouve actuellement confronté à une situation très préoccupante en matière de drogues qui présente une face hideuse de notre pays. Ainsi, malgré les efforts constants des pouvoirs publics pour endiguer la progression du trafic, l’usage de drogue reste aujourd’hui un problème majeur de santé et de sécurité, qui touche directement ou indirectement l’ensemble de la population ivoirienne. En effet, aux dommages sanitaires et sociaux, s’ajoutent des dommages de violence, délinquance, insécurité, économie souterraine. La question de la drogue reste aujourd’hui un sujet de société complexe pour notre pays. Tout le monde devrait être concerné par ce fléau (trafic de drogue) qui progresse de jour en jour. Dans ce contexte, la politique publique menée dans le domaine des drogues doit être plus ambitieuse et plus claire avec pour seul objectif de réussir à faire baisser durablement le nombre d’usagers et de trafiquants.
Par ailleurs, l’émergence de la contrebande de drogues en Afrique de l’Ouest, contribue aux économies illicites, à la mauvaise gouvernance et à la pénétration profonde du trafic de drogue et d’autres économies illicites dans la vie politique et économique de nos pays. Ce trafic est devenu le crédo économique des terroristes qui alimentent ou financent leurs funestes desseins par l’achat des armes avec cet argent sale. Par ailleurs, le contexte post-conflit de plusieurs États de la CEDEAO, la prégnance de la corruption à de nombreux échelons des forces de sécurité, de la justice et du monde politique de plusieurs pays, la faible rentabilité des activités économiques légales, dans un contexte de crise et la diminution de l’aide au développement, sont d’autres facteurs ayant favorisé l’émergence et le développement du trafic des stupéfiants (drogue) dans cette partie du continent.
Il faut noter que dans les pays où les institutions garantes de l’état de droit sont faibles, le commerce de drogues pourrait menacer l’État en offrant une filière aux organisations criminelles et corrompre des hommes politiques pour entrer dans l’arène politique, ce qui pourrait compromettre le processus démocratique, et même la stabilité du pays. Et le problème se perpétue. En effet, le succès d’hommes politiques financés par l’argent illicite en incite d’autres à participer aux économies illicites, ce qui entraîne une corruption endémique et le dysfonctionnement des institutions à la fois aux niveaux sous régional et national.
Un commerce de drogues important avec des trafiquants puissants a aussi des effets pernicieux sur la police et la justice du pays. Alors que l’économie illicite se développe, la capacité de faire respecter la loi et de conduire les procédures judiciaires diminue. L’impunité pour l’activité criminelle augmente aussi, compromettant la crédibilité et la dissuasion du système de justice. De plus, les trafiquants puissants ont souvent recours à la violence pour dissuader et éviter les poursuites judiciaires, tuant ou soudoyant les procureurs, les juges ainsi que les témoins.
Sous ses formes les plus pernicieuses, le trafic de drogue sur une grande échelle peut poser d’importantes menaces à la sécurité d’un État. Dans certains cas, le crime organisé, peut devenir violent au point d’empêcher un pays à faire respecter l’ordre, ce qui représentera alors une menace pour la sécurité nationale.
Par conséquent, il faut élaborer une réponse efficace pour faire face aux problèmes que pose ce trafic ignoble dans l’édification de l’Etat. Cependant, la mise en place de moyens drastiques et téméraires notamment des peines sévères d’emprisonnement pour les usagers et trafiquants, le déploiement massif des forces de l’ordre, le retrait des troupes des agents corrompus et mal formés. In fine, il ne faut pas uniquement s’attaquer aux symptômes de ce fléau, il faut aussi s’attaquer aux causes profondes.
Idriss DAGNOGO