La fête de la renaissance du PPA-CI organisée, le samedi 06 avril 2024, à Agboville, dans la région de l’Agneby-Tiassa, aura permis aux uns et aux autres, surtout à ceux qui continuent de croire en la renaissance de Laurent Gbagbo, de réaliser qu’il y a loin de la coupe aux lèvres. Et que le retour de l’ancien chef de l’Etat au pouvoir risque de se transformer en chimère. Et c’est peu dire. Pour étayer cette assertion, qu’il suffise de relever deux éléments pris dans l’allocution prononcée ce jour-là devant un auditoire acquis à sa cause et qui buvait littéralement ses paroles.
D’un, il est revenu sur le franc CFA. Ainsi, Laurent Gbagbo a pris position sur l’avenir du franc CFA, prédisant son abandon progressif par les pays africains dans les dix prochaines années. Il a fait savoir, avec cette gouaille qui le caractérise, que plus personne n’accordera de l’importance au franc FCA d’ici quelques années. « Le franc CFA, les gens vont le quitter bientôt (…) regardez, d’ici 10 ans, les gens partiront un à un de la BCEAO », a prévenu l’ancien chef de l’Etat. Mais cette déclaration divise ses partisans. Certains le soutiennent tandis que d’autres soulignent le fait qu’en 2010, il clamait les mérites de cette monnaie. « Gbagbo n’a vraiment pas de vision, il suit la clameur publique. Concernant le FCFA, son livre programme en 2010 faisait la promotion du FCFA. D’ailleurs, il s’était engagé à faire en sorte que la zone franc soit attractive afin d’attirer le Ghana, le Liberia, la Gambie, la Sierra Leone, etc. Mais, devenu panafricain au gré de ses intérêts et humeurs, il se sent obligé de suivre une certaine clameur », soupire Eugène Tapé, un GOR (Gbagbo ou rien) dépité.
De deux, Laurent Gbagbo a cru devoir voler dans les plumes de Charles Blé Goudé, son ex-co-détenu qui jouait aussi le rôle de cuisinier lorsque les deux hommes étaient dans les liens de la détention au pénitencier de Scheveningen. « Il y en a un qui dit : « C’est moi qui faisais la cuisine pour Gbagbo en prison ». Mais, il ne dit pas qui donnait l’argent. C’est bien Nady Bamba qui donnait l’argent. Il faut le savoir… D’ailleurs, celui qui faisait la cuisine s’appelait Germain Katanga, un jeune congolais. C’est après lui que celui que vous connaissez a pris le relais », a rappelé l’ex-époux de Simone Ehivet. Quel mépris ! Quelle ingratitude aussi. Le moins que l’on puisse dire, c’est que Laurent Gbagbo a donné un mauvais signal à l’opinion publique. On peut comprendre qu’il ait voulu mettre en lumière le rôle joué par celle qu’il nomme non sans affection « sa petite femme », mais avait-il besoin de manifester tant de mépris et de morgue mêlés pour celui qui symbolisait le soutien de son régime lorsqu’il était aux affaires (2000-2010) ?
Car, Blé Goudé n’est pas n’importe qui pour l’ancien mentor du FPI. De fait, le président du Cojep était à la fois le « fils » et une sorte d’ombre portée de Laurent Gbagbo dont il a défendu le pouvoir bec et ongles jusqu’à sa chute.
C’est en cela que ce qui s’est passé à Agboville ce jour-là pourrait induire un certain désenchantement entre la population, singulièrement, la jeunesse et les hommes politiques, comme le traduit si pertinemment cet internaute. « Si Laurent Gbagbo peut traiter Blé Goudé avec autant de désinvolture, qui sommes-nous pour ne pas connaitre le même traitement ? C’est un vrai questionnement. Qui aurait pu penser que l’ancien président parlerait un jour de Blé Goudé de cette manière. C’est un déni de tout ce que ce dernier a fait pour lui. C’est grave », s’est-il offusqué. Comment ne pas donner raison à cet internaute ?
Pour terminer, le meeting d’Agboville a apporté de l’eau au moulin de ceux qui soutiennent que Laurent Gbagbo n’est plus que l’ombre de lui-même après son retour, le 17 juin 2021. Et pour cause. Bien malin qui pourrait faire l’inventaire des impairs qu’il a alignés depuis cette date. De l’humiliation infligée à l’ancienne Première dame à son retrait du FPI, en passant par la nomination de Damana Adia Pickass au secrétariat général du PPA-CI, la liste est longue comme ça. Et pourtant, il continue à jouir d’une aura et d’une popularité restées intactes en dépit de tout au sein des GOR devenus insensibles aux maladresses de leur champion. C’est bien dommage !
Chris Monsékéla