Le capitaine Assimi Goita, chef de la junte malienne. On dit l’homme nerveux et très impulsif.
Si la crise des « 49 soldats ivoiriens arrêtés à Bamako » venait à perdurer, la Côte d’Ivoire a les moyens de rétorsion économique sur le Mali. C’est vrai que la levée récente des sanctions de la CEDEAO est susceptible de donner aux autorités maliennes un sentiment de victoire, mais qu’on ne s’y trompe pas, L’UEMOA avait pleinement la capacité de « débrancher » l’économie malienne, qui n’aurait dans ce cas pas tenu ne serait-ce qu’un seul mois.
Il faut savoir que les sanctions qui avaient frappé le pouvoir malien avaient été conçues afin d’avoir un impact limité sur les populations, qu’il s’agissait avant tout de ne pas punir. Ainsi la BCEAO avait suspendu ses concours au gouvernement malien, mais a continué à approvisionner les banques commerciales de ce pays. Ce faisant, le gouvernement malien a pu se refinancer ( s’endetter ) auprès des banques commerciales, afin de payer les fonctionnaires. C’était un mécanisme connu de tous, mais qu’on a laissé fonctionner. Une suspension du concours de la BCEAO aux banques commerciales aurait immédiatement mis à genou le pouvoir de Bamako, ce qui aurait pu rendre la situation incontrôlable dans le pays.
Or c’est quelque chose qui peut être mis en œuvre de façon subtile même en l’absence de sanctions. La Côte d’Ivoire est au commande de la BCEAO quoi que l’on dise. C’est le gouverneur de cette institution ( qui a toujours été ivoirien en vertu d’une règle non écrite ), qui décide en dernier ressort du montant des concours à apporter aux banques commerciales des pays membres. Si la crise avec le Mali venait à s’envenimer, le pouvoir ivoirien pourrait être tenté de jouer cette carte, priver les banques maliennes de liquidités.
La Côte d’Ivoire a aussi deux autres cartes maîtresses à sa disposition. Elle alimente le Mali en deux produits essentiels, l’électricité et le carburant. Si le pays venait à suspendre les fournitures de ces deux produits essentiels, le Mali serait pratiquement à l’arrêt du jour au lendemain, surtout en ce qui concerne l’électricité. On ne voit pas comment il pourrait s’approvisionner ailleurs. Outre le fournisseur qu’il faudra trouver, des travaux d’interconnexion seront nécessaires, qui prendront du temps. Quant au carburant , son effet se fera ressentir au bout d’un mois tout au plus.
Que veut réellement la junte malienne dans cette crise ? Veut-elle « échanger » les 49 soldats contre le fils d’Ibrahim Boubacar Keita, qui vit en Côte d’Ivoire depuis la chute de son père ? Il fait l’objet d’un mandat international lancé à son encontre par les autorités de Bamako. Mais la Côte d’Ivoire a annoncé qu’elle l’extradera lorsqu’il y aura un pouvoir issu d’élections en place à Bamako. Ce fut le premier contentieux entre les deux pays. La position très dure de la Côte d’Ivoire sur la question des sanctions à l’encontre de Bamako a acté le divorce entre les deux capitales. En tout état de cause, la Côte d’Ivoire a les moyens de mettre l’économie malienne en grande difficulté, et cela du jour au lendemain. Et c’est quelque chose que le gouvernement ivoirien doit faire pleinement comprendre aux Maliens. Ils perdront gros dans cette crise.
Douglas Mountain
Le Cercle des Réflexions libérales
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