L’opération de déguerpissement initiée par le district autonome d’Abidjan sous l’instigation de Cissé Bacongo, ministre-gouverneur de cette entité décentralisée, fait des vagues. C’est le moins que l’on puisse dire. D’autant qu’elle ne laisse personne indifférent. Entre les condamnations et les approbations sur fond de divisions politiques exacerbées par les différents antagonismes entre leaders politiques de tous bords, beaucoup continuent de s’interroger sur le jeu trouble du maire de Yopougon, Adama Bictogo, cumulativement président de l’Assemblée nationale.
En effet, il est difficile de se retrouver dans les actions, voire les manœuvres de cet édile, cacique du Rhdp comme le ministre, gouverneur du district autonome d’Abidjan dont il n’a pas hésité publiquement à dénoncer l’ordre de déguerpissement des zones à risques de la commune aux Mille maquis. Notamment, le bidonville Gesco détruit par des bulldozers. Adama Bictogo a donc cru bien faire en condamnant, sans rémission, la démolition des habitations et commerces de cette zone emblématique de « Poy ». Dans la foulée, il avait laissé entendre qu’aucun engin destructeur ne foulerait désormais le sol de la commune sans son autorisation. Une détermination et un engagement qui ont apporté un certain réconfort aux populations impactées par cette opération de nettoyage à sec.
Mais, quels ne furent la surprise et, surtout, le choc de celles-ci lorsque, quelques jours plus tard, d’autres zones ont été attaquées par les « engins de la mort » envoyés par le district d’Abidjan. Les assurances du maire Adama Bictogo sont donc passées à la trappe. Au grand désespoir des habitants touchés par l’opération de déguerpissement. Et comme s’il ne mesurait pas la gravité de la situation, Adama Bictogo n’a pas mieux trouver pour manifester sa solidarité aux victimes que de leur envoyer des sacs de riz. Choquées, ces dernières lui ont renvoyé son riz. Le message subliminal est clair. Ce n’est pas de riz ou de nourriture que les populations impactées ont besoin en ce moment. Mais de logements. Comment ne pas regretter le geste du maire de Yopougon qui montre ainsi qu’il est dans une logique électoraliste? L’objectif étant de faire accroire qu’il reste solidaire des victimes. Sauf qu’il semble avoir oublié qu’il a pris des engagements et que le moins qu’il puisse faire, c’était de les honorer. En ne laissant pas à nouveau les bulldozers détruire d’autres habitations.
De plus, la mise en scène à laquelle il s’était livré la première fois en jetant en pâture le ministre-gouverneur Cissé Bacongo est du plus mauvais effet. Pour la bonne et simple raison que les deux hommes appartiennent à la même formation politique ; le Rhdp. Subséquemment, le maire de Yopougon n’avait pas à interpeller Bacongo sur la place publique. Il sait où le trouver.
Cela dit, quel homme sérieux peut-il soutenir, la main sur le cœur, que cette opération est inopportune et que le district d’Abidjan pouvait en faire l’économie ? Qui ne se souvient de ces drames consécutifs aux pluies diluviennes qui s’abattent sur la capitale économique en saison de pluies ? Il nous souvient d’ailleurs que les pertes en vies humaines enregistrées lors de ces catastrophes naturelles sont imputées aux autorités dont le laxisme est chaque fois pointé par les opposants. Et ce sont les mêmes qui osent attaquer cette opération de déguerpissement qui vise justement à préserver les vies des populations concentrées dans les zones à risques. C’est à croire que les détracteurs du régime n’ont plus rien à dire. Parce qu’on ne peut demander une chose et son contraire. C’est une question de cohérence. Tout simplement.
Franck ETTIEN
Journaliste. Fondateur du journal en ligne ADJUWA.NET
Vice-président et porte-parole de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire (UNJCI)
Master en Sciences politiques