En dépit de leur asymétrie en superficie, en richesse, population et prouesses militaires, la Côte d’Ivoire et le Mali sont engagés dans un bras de fer depuis le coup d’Etat militaire perpétré par une junte militaire dirigée par le Colonel Assimi GOÏTA. Le pouvoir de la Junte militaire rabat les cartes de l’ordre géopolitique notamment la carte de la souveraineté dans le but de rester longtemps au pouvoir sans qu’autres Etats ne s’ingèrent dans les affaires de sa cuisine interne. Cette prise du pouvoir par la force a été dénoncée par les organisations continentales, régionales et internationales. Elle fut par ailleurs sanctionnée par la CEDEAO l’organisation Ouest Africaine à laquelle le Mali est tributaire. Un embargo économique et financier a été retenu afin de faire plier la junte militaire à écourter la transition et revenir au plus tôt à l’ordre constitutionnel. Ce blocus économique et financier a été par ailleurs levé par la CEDEAO après l’acquiescement des autorités maliennes à revoir leurs positions pour un retour à l’ordre constitutionnel.
En effet, la Côte d’ivoire et le Sénégal étant les pays dont dépend le Mali pour ses exportations et importations ont suivi à la lettre les recommandations de l’organisation sous-régionale. La majorité des transactions macroéconomiques maliennes passe essentiellement par les ports ivoiriens d’une part et d’autre part, son autonomisation en Energie Electrique est soutenue par la Côte d’Ivoire. Le bras de fer entre les deux pays n’alimente pas seulement l’instabilité eu égard à l’avancée des Djihadistes qui menacent la sous-région mais à un impact immédiat sur les populations maliennes et burkinabés. Cette rivalité intensifie les divisions et de ce fait il est encore plus difficile pour la CEDEAO et ses États membres d’élaborer une politique homogène au sujet du Mali.
Aussi bien la Côte d’Ivoire que le Mali sont très désireux de mettre en avant des thèses contradictoires et controversées sur le caractère du conflit, alors qu’il serait nécessaire de trouver des solutions diplomatiques. Ils se sont engagés dans une série de communications politico-militaires qui est en train de dériver vers un discours médiatique déclamatoire. En effet, pour Bamako, sa description de la Côte d’Ivoire comme étant résolue à déstabiliser Assimi GOÏTA, a alimenté la thèse officielle selon laquelle des forces extérieures essaient de saboter le Mali et sa junte au pouvoir en plein essor militaire avec WAGNER. Thème clé de manipulation des dirigeants maliens lorsqu’ils expliquent leurs objectifs de politique à leurs concitoyens.
En effet avec la prise en otage des 49 militaires ivoiriens accusés injustement, l’on se demande quelles sont réellement les intentions et motivations de la junte vis-à-vis de son voisin ivoirien malgré la facilitation du Président Togolais Faure GNASSINGBÉ ?
Eh bien, elle s’active orgueilleusement dans un populisme exacerbé à crier à tue-tête de souveraineté du Mali. Faut-il lui rappeler que, bien que la Souveraineté soit la capacité à ne pas se voir imposer la volonté des autres (principe de non-ingérence), mais c’est aussi un devoir de protection de ses compatriotes. La vraie souveraineté est la capacité à répondre aux besoins des citoyens, à contrôler les destinées. Un pays qui dépend d’aides extérieures pour nourrir sa population n’est pas souverain.
Nous sommes bien convaincus qu’après le départ d’une manière ou d’une autre des militaires du pouvoir, la Côte d’Ivoire et le Mali décideront de poursuivre une politique de détente, de paix afin de construire de nouvelles coopérations bilatérales et de briser son isolement international et régional.
Idriss DAGNOGO